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Le conseil
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Le conseil
Le Conseil *
Tu vois, le Bien n'est pas forcément ce que l'on croit, par exemple le faire, ou plutôt croire qu'on le fait ou encore, penser qu'il vous désigne par telle aguichante ou crédible injonction !
Le bien, cela peut être aussi de ne faire rien, s'abstenir, décliner telle offre profitable ou flatteuse, s'installer dans une autre forme de providence, ne pas s'imaginer au-dessus de ce qui irait sans toi, laisser ce qui est à son existence nue, ou venir seul à terme ce qui le doit.
Ne pas plus te mêler alors, de l'aboiement des chiens, du caquètement des poules, de la durée des ruminations, de la roue du paon, du festin des vautours, et même de l'odyssée des baleines, pas plus des processions de fourmis, partout si à l'aise, ou du travail, si nécessaire, des bourdons saisonniers.
Pense, si tu ne comprends pas ce discours, au feu, à l'orage, aux conductions de la mer, au vol de l'aigle ou du colibri, à l'œuf encore ou au sommeil tout à leur genèse universelle et « esseulée », ou encore à l'alchimie du miel, du sperme ou du sang et tant d'indépendantes gésines délivrant ce qui doit se poursuivre, chacun porteur d'une essence et qui, sans doute, fait mieux…
Tu tiendras encore plus à distance la chevauchée de certains capitaines exaltés et leur harnachement mental tout corseté parfois d'insignifiance, d'infatuation ridicule, sinon d'idéal délétère pour cause d'imagination abusée et si peu de substance à l'échelle d'un plus grandiose.
Le meilleur se pourrait à ne paraître rien, fuir la parole de ceux qui confondent ce qui vaut avec de fausses révérences à eux-mêmes ou cet apaisement de l'orgueil rejailli d'un supposé devoir, lequel toujours est fomenté d'ailleurs moins avouables et finalement contraires.
A la rigueur t'enticher à peine de cela qui, de lui seul, se veut ou se proclame et n'a besoin de toi, ouvrir tes volets au soleil charitable ou à la lune pleine certaines nuits embaumées et observer, prospérant plus loin ou parfois tout proches, les grands mensonges qui ne pourront durer longtemps pour cause de leur nature.
Alors, tu attendras l'abaissement du rideau sur telle scène enjôleuse, que dehors, s'estompent les nuages noirs ou faiblisse le vent, que bientôt, reparaissent les bourgeons et revienne l'été à son heure fidèle, puis, dans ces sillages, dont pour la plupart tu n'es cause, à l'aval des grands fleuves ou de petits ruisseaux même, tu verrais s'avérer, plus fortuné sans doute, l'emblème d'une sagesse bien mieux diligente car elle, ne demande rien.
© Claude-Raphaël SAMAMA - 2018
* Ce texte, repris depuis, avait été écrit à la suite de l'intervention occidentale contre la Libye, alors que bien d'autres perspectives pouvaient être envisagées… Il aurait pu en aller de même pour plusieurs pays du Moyen-Orient et ailleurs, où certains se croient obligés de mettre leurs grains de sel ou des gouttes d'acide… Pas forcément pour le « Bien » des peuples. Le « bien » peut être l'ami du pire. Avis !